L’image voulue

S’installer quelque part apporte des précisions sur nous-mêmes. « Je suis liée à l’endroit où je réside, je suis dépendante de ce territoire par rapport à ses services, à ses transports et à son image. Ma vie personnelle et professionnelle commencent voire recommencent avec cet endroit. Son image sert-elle la mienne?  Et cette rive gauche est-elle à notre image ?

Nous nous sommes déjà penchés sur cette notion d’image voulue en analysant, au fil de nos articles, les stratégies territoriales de certaines communes de la rive gauche et de la Métropole Rouen Normandie qui les assemblent. Les objectifs semblent clairs, les futurs résidents sont vivement souhaités et attendus car notre territoire assiste à la fuite des ses habitants. Pourquoi ? Un défaut d’attractivité a été pointé, un bassin d’emplois peu diversifié également, la faute à la pétrochimie ? Une trop forte proximité avec Paris est, souvent, un argument repris.

 

J’ai travaillé et ai résidé à Paris pendant près de 15 ans. Durant ce temps, je ne connaissais pas Rouen et il ne me serait pas venu à l’esprit de m’éloigner, de faire autant de distances, j’ai privilégié la ville elle-même quitte à sacrifier mon espace de vie: petit mais sur place.

 

Il demeure pressant, aujourd’hui, de sortir d’une oligarchie qui a causé un repli dangereux pour ce territoire. Cet espace de référence peine à être visible ? Cela vous étonne ? Peut-être était-ce un souhait politique premier que de rester dans cet entre-soi local, sans se dire qu’un jour ou l’autre les populations, l’espace lui-même seraient en difficulté.Ce processus inopérant s’est montré très efficace paradoxalement. Plus on se tient éloigné des citoyens, moins on accède au partage. Plus on ne tient pas compte des attentes, des besoins, plus on crée les conditions de l’exclusion dans tous les sens du terme. Exclure c’est être exclu à son tour un jour ou l’autre.

Dynamiser, galvaniser sont des actions qui prennent appui, tout d’abord, sur la considération d’une parole sans se substituer à elle. A laisser faire, laisser courir, nous ne sommes plus en capacité de retenir. Alors, qui est resté ? Ceux qui n’avaient pas le choix ? Sincèrement ?

Screenshot_2019-06-17 Dans la compétition des métropoles, Rouen peut-elle s'imposer (1)

Comment passer d’un endroit dont peu parlent, d’un recoin à une ouverture aux quatre vents ? Comment l’espace de relégation devient-il « la » destination choisie ?  Il y a de très grands pas à faire mais les changements de postures peuvent avoir un impact considérable. Repenser son comportement politique pour décloisonner, sortir de ce postulat de seul décideur. Insuffler, permettre, créer des espaces où les regards viendraient d’horizons diversifiés.

 

Entendre c’est déjà respecter.

 

Mais encore faut-il se saisir de ces bouleversements sociétaux pour penser cette situation comme une opportunité et ouvrir une interrogation sur les qualités de ce territoire, les manières d’y vivre c’est-à-dire comprendre, enquêter et analyser les raisons de sa désaffection.

Puis, écouter ceux qui résident, ceux qui produisent des ressources. Les habitants ont un vécu fidèle avec la rive gauche et leurs raisons ne sont pas qu’économiques. Entendre ce que disent ces personnes auraient du prendre forme antérieurement, ce sont eux qui font l’histoire de cet espace. De plus, déterminer l’attractivité fait appel à ce que le territoire propose comme possibles, que permet-il ? Que met-il à disposition?

Ne pas prêter l’oreille revient à renvoyer aux visages de ces vies de résidents qu’elles sont sans importance et que la population suivante sera, de facto, plus intéressante. Cliver en restant sourd semble être un geste politique qui n’a pas encore tout saisi aux transformations sociétales auxquelles nous assistons.

Il faut composer avec et non pour les gens.

 

Cependant, l’impression, que laisse ce renouvellement urbain rive gauche, s’approche de la bousculade, de la gestion de crise. En effet, pour satisfaire les nouveaux arrivants, c’est-à-dire pour satisfaire une projection objectivable en termes de logements, des travaux, des immeubles sont en cours de réalisation. En plus de scléroser un peu plus le paysage, de créer ex-nihilo ou de détruire, ils ont accru des gênes (bruits, poussières, propreté des chantiers…) et une pollution de l’air. Prenez le temps de consulter le rapport d’étude publié par Atmo Normandie . De  surcroît ne l’oublions pas, les citoyens sont de plus en plus exigeants quant à leur qualité de vie, alors, avec la pollution de l’air résultante de la présence de la Sud III à Petit-Quevilly, par exemple, les choses se compliquent…Le diagramme ci-dessous révèle que le seuil limite est largement dépassé!

Screenshot_2019-06-28 Evaluation de la qualité de l’air ambiant à proximité du trafic sur le territoire de la Métropole Rou[...](1).png

Capture d’écran sens de lecture modifié page 20 du rapport publié par Atmo Normandie

Aujourd’hui, les sol se parent d’immeubles, la place faite au béton ne cesse de croître, les arbres tombent, les quartiers changent et c’est la radicalité qui l’emporte. Ce n’est pas en mettant des gifles à un quartier que les choses deviennent séduisantes. En quoi cela participe à donner un sens commun à une action politique, d’ailleurs, en quoi une décision locale a quelque chose de commun avec les populations ? Ici, rien ne va plus.

 

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Nature morte, Petit-Quevilly & Rouen avenue de Caen, rive gauche, IPL, juin 2019

 

#sitespecific se fait l’écho de ces constats alarmants, de ce désordre urbain qui galvanise les souffrances de ce territoire social: les cadres de vie sont enlaidis, sauvagement abimés, les espaces sont lacérés par des bandes de rues, d’avenues, de routes…Que faire ? Changer notre attitude.

 

Nous ne faisons pas usage de la ville qui nous voit vivre, nous sommes ses habitants. Personne ne viendra sur un territoire sinistré car le « tout béton » c’est la fin, la mort assurée.

 

#sitespecific existe factuellement depuis désormais quatre mois mais depuis de mon arrivée, ici, je réfléchis à comment valoriser, comment mieux traiter cette rive et ses habitants, comment ? En restant vigilante, en étant une observatrice concernée et aguerrie de la vie de mes quartiers, de ma commune et de celles qui l’environnent.

 

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Drama, Avenue Jean Jaurès, Petit-Quevilly, Rive gauche, juin 2019, IPL

 

Ce Projet est le fruit de constatations et de remarques, de prises de pouls. Il est l’enchainement naturel d’un travail de recherche entrepris pour la rédaction d’un mémoire universitaire. Ce dernier est la digression d’un autre mémoire engagé en 2016 qui concernait la rue comme patrimoine mémoriel. Ces requêtes sont un écho à des recherches impulsées depuis des années car tout lieu de vie se suffit à lui-même pour initier une investigation exigeante.

La rive gauche se voit dotée d’un patrimoine matériel et architectural exceptionnel, le seul qui soit le plus régulièrement mis en valeur c’est l’Atrium, ancien pôle régional des savoirs. Figure luxueuse, il trône sur ce boulevard de l’Europe et crée un angle avec la rue St Julien. Il est cette arrière base majestueuse certes mais où est la diversité ? Où sont les autres patrimoines ?

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De la sophistication, rive gauche quartier st clément, Rouen, IPL, 2019

 

#sitespecific est indépendant, fruit de constats. Ses rencontres prennent des formes variées pour permettre un échange simple, offrir des possibilités, donner de la voix à une rive qu’on entend guère. Ce projet possède des valeurs. Elles résultent toutes d’un état d’esprit fair-play qui ne cherche pas le combat, n’évolue pas dans des sphères politiciennes. Il n’a pas d’image à soigner, de blason à redorer. L’image qu’il souhaite donner c’est celle de la restitution.

Que la modernité de la rive gauche soit vue, que sa capacité à vivre en dehors des clous soit comprise, qu’elle soit reçue comme un territoire vivant ni astreint au résidentiel ni à l’éloignement. C’est un espace qui, à force d’être mis dans l’oubli, se révèle être en mesure d’ être indépendant.

Les approches du projet parfois surprennent car il croit en la pertinence du terrain, en la proximité parce que cette rive, c’est elle qui l’a reçu, qui l’a invité hier à rester.

 

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Avenue Jean Jaurès une période sombre, Petit-Quevilly, rive gauche, juin 2019, IPL

 

 

Parler de ce qu’on connait non pas sur le papier, ni par le biais de recherche mais de ce qu’on pratique au quotidien, c’est cela, une parole citoyenne. Le projet n’investigue pas comme le ferait un porte parole, il produit à partir d’un construit. De ces endroits où il s’inscrit, il suit des traces, prend des chemins réflexifs mais il ne souhaite pas créer d’ascendance. Et curieusement c’est cela qui déroute. Comment être fédérateur ?

 

IL n’y a pas de solution miracle, mais il semble évident que nous portons des paroles oubliées. Que des espaces permissifs à ces échanges n’existent guère ou alors à nous de nous les (ré)approprier. Ce projet c’est tout d’abord une façon de reposer la question d’une visibilité non autorisée.

 

Les prochaines rencontres se produiront dans des lieux publics. Privilégiant les espaces verts parce que proche, gratuit, ouvert à tous. #sitespecific confirme que les prises de paroles se doivent d’être simplifiées en termes d’accès. Pas de locaux fermés, pas de bar/Café où il faut consommer, organisons-nous à partir de ces endroits, cadres que nous croisons au quotidien. Essentialiser nos entrevues en les leur donnant ce caractère courant s’avère décisif.

Par le passé, cette rive et ses remparts rouennais, comme nous aimons à les appeler, faisaient l’objet de carte postale.

 

Je ne sais pas si vous mesurez la fierté architecturale qui se dégage de cette vue prise depuis la tour de la sécurité sociale (Architecte Tougard). Cette merveille rouennaise d’où est offerte cette vue a fait l’objet d’un temps d’étude architectural lors du 1er rallye ‘Specific (29 juin 2019).

Le 1er article concernant le rallye vient de sortir: S’émanciper de son invisibilité

Isabelle Pompe pour #sitespecific, 02 juillet 2019.

Territoire extra-local & Environnement

Dans le chapitre « Territoire social & Observations citoyennes », #sitespecific va se pencher sur notre environnement. A partir des moyens démocratiques qu’il met en œuvre comme la mise à disposition d’informations vérifiées, la transmission, le relai des bonnes pratiques et la veille des outils existants mis en place par les collectivités, #sitespecific propose des portes d’entrée diversifiées vers les problématiques sociétales et environnementales qui nous impactent directement depuis notre territoire extra-local. Ces items sont abordés lors des rencontres informelles comme les Terrasse’ Specific, Rallye ‘Specific et autres Ateliers ‘Specific.

Jardin carré 2.jpg

Jardin de la Chartreuse St-Julien sera examinée, in-situ, lors de l’Atelier’ Specific #1 au regard de plusieurs thématiques.

Entendre ce que dit le territoire

Notre espace de référence, la rive gauche, s’ancre dans une région fortement marquée par des conditions climatiques spécifiques. Nous ne pouvons plus ne pas activer ni ré-activer les ressources que ces spécificités expriment. Ne subissons plus notre pluie, notre brouillard et notre vent! Lorsque cela est possible, repensons nos espaces de partage citoyen.

  • Depuis les lieux insuffisamment inexploités

Beaucoup de lieux pourraient être davantage exploités, comme la place des Emmurés à Rouen pour l’organisation de temps d’échanges et la mise en place d’une programmation cultuelle, sociétale, environnementale proche des habitants. Mais aussi combien de lieux, dans l’espace public, sont inadaptés parce qu’ils se présentent comme des espaces mal desservis, des plaines vides, sans arbre producteur de convivialité et d’ombre etc… Il est temps de cesser de regretter et de trouver la météo capricieuse, alors offrons-nous des choses! Listons ensemble les possibles qui s’offrent à nous et que nous pourrions autrement investir. Dans chaque commune de la rive gauche demeure cette inconnue, méconnue ou sous- utilisée qui ne demanderait pas mieux d’avoir des vies multiples.

  • Depuis les évènements, manifestations

Nous ne pouvons plus envisager d’évènements sans penser à la pluie. Ceux qui ont lieu en plein air devraient intégrer, pour assurer le confort aux publics qui ont fait le déplacement, un impératif: donnant -donnant. Les gens sont venus vous voir, alors respectez cette initiative et instruisez dans vos démarches, les conditions optimum pour les accueillir dignement.

De même lors de périodes de fortes chaleur, pensez aux éléments nécessaires pour pallier à ces expositions subies qui peuvent engendrer des malaises, voire un renoncement au déplacement. Les personnes se sont dirigées vers vos propositions de sorties (culturelles, touristiques), faites attention à les recevoir en prévoyant une gestion des flux opérationnelle, des zones de rafraichissement et/ou d’ombre avec de quoi remédier à la fatigue engendrée par cet épisode météo, par cette station debout prolongée. D’une manière générale, les bancs au même titre que les toilettes sont à revoir en France au regard de l’égard porté aux publics…L’Armada et sa dernière édition du 6 au 16 juin 2019 n’a pas suffisamment considéré ses équipements et ses services (gestion des flux, commodités payantes, parkings aux tarifs élevés, très peu de propositions pour s’asseoir (l’impératif du attendre debout n’est pas acceptable aujourd’hui lorsque l’on se targue d’être un évènement de grande envergure). Ont été à déplorer également le peu d’espaces non privatisés ( pour manger, boire, se reposer) et une sous-utilisation des environs (Chai à vin et toutes les coursives situé quais rive droite de la manifestation).

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L’Armada et sa typologie de public, observée par #sitespecific, IPL, 15 juin 2019

Il en est de même pour La Friche Lucien. De par l’étendue en nombre de mois, de sa programmation, celle-ci devrait réfléchir plus précisément à comment recevoir malgré la pluie en installant des tentes et autres bâches de protection par exemple.

Des efforts encore à faire

Les manifestations doivent prendre en charge le respect de l’environnement dans le traitement de leurs déchets (tri), dans l’interdiction qui s’impose à elles d’avoir recours aux plastiques, d’utiliser des supports bio dégradables et de veiller à leur impact carbone, en veillant à la mise à disposition d’un accueil efficient des transports doux (vélo, skate…) et en privilégiant le recours aux transports en commun. La Friche Lucien a été interpellée sur ces sujets lors d’un post FB du mois de juin. Là, encore l’Armada a très peu prisé le recours aux vélos en ne mettant pas à disposition des parkings/garages spécifiques. A partir d’un point d’étape (ici consécutif à une fermeture, un post FB de la Friche Lucien du 10 juin 2019), voici ce que disent les porteurs de projet eux-mêmes

  1. Ce sur quoi ils ont fait/produit des efforts
  2. Là où ils ont été vigilants

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  • Depuis les éléments naturels

Ne nous focalisons pas sur les tempêtes et sur notre vulnérabilité face à elles, toutefois,  interrogeons-nous sur comment mieux vivre cet inévitable climatique qu’est le vent. Vivre avec les éléments est notre priorité. Mal identifiés et relativement peu prévisibles, les dangers de ce dernier sont souvent minorés, concentrons -nous sur les bénéfices que cette contrainte produit. Elle nous invite à changer de regard sur notre habitat, nos structures, nos architectures, notre rapport au « plein air ». Il nous faut tirer parti de cette ressource et nous adapter.

Pour montrer que l’on peut chercher à vivre avec ces éléments météorologiques et non plus contre eux: « la résilience peut s’effectuer en tirant parti des phénomènes climatiques, comme nous le prouve le projet prospectif de réaménagement des berges de Manhattan intitulé « Big U ». Cette promenade composée d’une végétation brise-vent qui la protège de la forte montée des eaux propose d’adapter ses activités en fonction des phénomènes climatiques. Source

Le vent, pourrait être producteur d’énergie, pourquoi la ville comme la métropole ne se servent pas de ce formidable élément naturel!Combien de scientifiques et de projets travaillent sur ce sujet!

De même pour la pluie, pourquoi ne pas repenser nos démarches collectives et nous convier collectivement à récupérer et conserver cette eau…Rouen serait 10 ème au classement des 10 villes les plus pluvieuse de France…. »Avec 790 mm de pluie par an, Rouen fait certes moins bien que Biarritz ou Brest, mais reste cependant une ville associée aux bottes en caoutchouc et aux parapluies ! »Source

Et pourtant d’eau, nos villes de demain en ont besoin, il est donc plus que vivement recommandé de sortir de l’individualisme sur ce sujet car l’eau fait partie des 3 principes de l’urbanisme durable qui vise à lutter contre les îlots de chaleur urbain (ICU) Source

Les collectivités doivent avoir une politique plus ambitieuse de leur gestion de l’eau et encourager les habitants à ne pas gaspiller, à considérer cet élément vital comme un bien précieux en impulsant des actions de sensibilisation contre le gaspillage, il en va de même pour nos énergies.

 

Canicule & îlot de chaleur urbain

Des périodes de fortes canicules ont touché notre territoire les étés précédents, au même titre que des pics de chaleur sont également recensés sur des périodes non habituelles. Nous sommes confrontés au réchauffement climatique, ce, de manière spécifique, en raison de nos espaces urbains. Que cela soit à Rouen ou sur sa proche couronne, là où la densification de population et d’activités reste fortement marquées, le problème reste donc le même. Nous regarderons cela à l’échelle d’un quartier, celui de Saint-Sever depuis ses récents travaux d’aménagement.

ICU

« Un îlot de chaleur (ICU) est caractérisé par une température de surface ou de l’air plus élevée en zone urbaine qu’en périphérie de la ville. Cette différence de température peut être de plus de 12°. Les îlots de chaleur peuvent également désigner une zone à l’échelle du quartier où l’on observe une température plus élevée.

Mais les îlots de chaleur urbains ne sont pas une fin en soi. Il existe bien des solutions pour lutter contre leur formation et ainsi agir sur la qualité de vie en milieu urbain. Cette révolution trouve son essence dans la façon d’aménager la ville et les solutions techniques à disposition aujourd’hui.

Les bénéfices de ces stratégies de la ville durable s’observent à plusieurs niveaux : environnementaux, sanitaires, esthétiques et qualité de vie. »Source

La stratégie de ville qu’a opéré la Métropole Rouen Normandie avec son  » cœur de métropole », au-delà des discours politiques, impose un arrêt et une observation précise.

  • Travaux St Sever
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Saint-Sever en Eglise et Plomb, IPL, juin 2019

Ses travaux ont été le fruit de différents axes de « développement » du quartier, d’une part lui redonner « peau neuve »  en écho aux travaux entrepris dans le centre commercial. De plus, « ne pas oublier la rive gauche » selon Frédéric Sanchez Source pour le projet « Cœur de Métropole » impulsé par la Métropole Rouen Normandie et d’autre part, engager une refonte de la perception en termes d’images, de la rive gauche et son artère première, symbolique et plurielle: St Sever (sa rue, son quartier, son centre commercial, sa mairie annexe, sa MJC…).

Nous vous rappelons que les travaux de la rue St Sever, entrepris fin 2017, ont eu un coût de 1,7 million d’euros, financés par la Métropole Rouen Normandie (avec une participation de fonds européens, à hauteur de 40 %). Ils ont déclenché, également, des conséquences sur l’économie du quartier même s’il a été précisé que la rue était piétonne, il n’en demeure pas moins que l’accès rendu quasi impossible aux hôtels du quartier par exemple, a porté durablement préjudice à ces derniers.

La rue et ses travaux donnaient cela à voir, pendant plus d’une année:

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Photo du journal Actu 76 – Source

Une rue impraticable, d’où sont tombés les arbres, les marronniers roses (au centre de la rue), et où, entre le bruit, la poussière, il était très difficile de se promener, de consommer, de s’arrêter à une terrasse bref, de soutenir économiquement le quartier. Ces travaux ont été subis par les habitants du quartier, par les commerçants et ont engendré des difficultés de trésorerie qui semblent aller de soi. Un mauvais moment à passer qui prit le temps de s’arrêter…

Revenons, un instant sur cette notion d’image, de cadre de vie. Les éléments de réponse de la métropole pour justifier son projet d’aménagement tiennent en : « apporter de la lumière », refaire les canalisations, repenser le « sol » (pavage, dallage), ré-introduire la nature en ville et offrir un nouveau mobilier urbain. Cela en écho avec les travaux entrepris sur la rive « d’en face » tels sont les mots employés.

  1. La lumière ? En enlevant les zones ombragées qui apportaient un charme à la rue et qui permettaient à la population de s’asseoir et de respirer un peu, la Métropole, avec cet aménagement urbain, a mis la rue à la disposition du soleil.
  2. Le choix des arbres ? Ce n’est pas à l’aune des allergies que nous répondrons mais tout simplement au regard de la fragilité des arbres jeunes lorsqu’ils viennent d’être plantés et donc de l’attention naturelle qu’ils méritent mais également par rapport à leurs systèmes racinaires.

Bouleau Versus Marronnier rose

Alors qu’une bataille semble s’être engagée entre deux espèces d’arbres, hormis le critère esthétique et le fait que les marronniers étaient arrivés à maturité, essayons de voir si différences et explications implacables il existe:

Le bouleau a une croissance rapide. Le Bouleau pubescent supporte le froid jusqu’à -40° (zone 3). Le Bouleau verruqueux supporte le froid jusqu’à -23° (zone 6). Sa Durée de vie est estimée à 100 ans. En tant qu’espèce pionnière, le bouleau ne vit pas vieux.  Ses Racines sont traçantes. Elles s’étalent loin du tronc : ne pas planter de bouleau près d’une canalisation ou d’une terrasse.Source

Le Marronnier, quant à lui, a une Rusticité de type zone 6 (il supporte le froid jusqu’à -23°). Sa durée de vie est estimée à 200 ans soit le double de celle des bouleaux. Habitat : essence de lumière (héliophile), le Marronnier est planté dans les parcs et jardins. Mais il souffre de la pollution urbaine et de la sécheresse. Sa taille maximale est de 30 m, sa croissance est, elle-aussi, rapide. Source
Donc, alors que les racines du bouleau sont problématiques, c’est lui qui a été choisi. Les canalisations ont été refaites, vous vous souvenez…

Le mobilier urbain plébiscité par la Métropole, prône l’absence de banc et ne revêt aucun confort comme vous pouvez le voir sur la photographie « Saint-Sever en Eglise et en Plomb » réalisée en juin 2019. Des cubes, bas, sans dossier qui ne permettent pas aux  personnes de se poser très longtemps, de s’approprier les espaces publics ni aux « joueurs », tels que je les ai nommé de s’installer, de donner de la « vie » à la rue principale de ce quartier.

 

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Les joueurs des espaces de relégation, St-Sever, juin 2019, IPL

 

Les autres villes et leur réponse à la montée des température

Rafraîchir les villes, des exemples:

  • Réintroduire la végétation en ville grâce à la trame verte
  • Ouvrir les espaces pour éviter l’effet de canyon urbain
  • Recourir aux revêtements de sol perméables
  • Choisir les matériaux selon leur albédo
  • Aménager en tenant compte des vents et du soleil
  • Cool-roof (revêtement de toiture blanc)Source

Albédo: l’indice de réfléchissement d’une surface en fonction de sa couleur mais aussi de sa texture et porosité. Valeur comprise entre 0 et 1 : un corps noir a un albédo nul car il absorbe toute la lumière incidente et un miroir, un albédo de 1 car il réfléchit toute la lumière incidente.

« Dans les villes, les surfaces asphaltées et les habitations denses interceptent les rayons du soleil et emmagasinent la chaleur. « Source Le Monde

La France est en effet régulièrement touchée par des épisodes caniculaires, comme nous l’avons précédemment écrit, la ville de Rouen et sa métropole souffrent également de ces situations qui sont amenées à se reproduire au point de perdre leur caractère exceptionnel. Les communes, en raison de leur aménagement urbain, ne parviennent peu ou pas à se refroidir la nuit. Pour endiguer ce phénomène, les villes adaptent leur PLU (Plan Local d’Urbanisme) à ces cas de figures. Des réponses plurielles sont apportées comme la construction de villes plus aérées, des efforts sur les « matériaux utilisés dans le revêtement des sols avec des propriétés optiques et thermiques favorisant la rétention de la chaleur par le tissu urbain »… La température des villes croît avec son activité humaine, les villes les plus peuplées pourraient voir leur température grimper de plus de 8°C d’ici à 2100. Refroidir les bâtiments, repenser les matériaux de construction, reverdir, ré-humidifier… Car mourir de chaud est un risque encouru par 30 % de la population mondiale Source 

« Le Grand Lyon, avec la remise à l’air libre du ruisseau de La Duchère, ou la création d’un espace vert infiltrant les eaux de pluie au parc Jacob-Kaplan œuvre en ce sens. « Il faut retrouver des points d’eau en ville afin de permettre aux phénomènes d’évaporation de mieux réguler la température ambiante », rappelle Erwan Cordeau, chargé d’études sur le climat, l’air et l’énergie à l’Institut d’aménagement et d’urbanisme. La dés- imperméabilisation de la ville et le retour de l’eau sont sur le devant de la scène, en effet, le retour de l’eau dans nos sols et autres surfaces de stockage permet de rafraîchir l’air. C’est également une opportunité pour la restauration de la biodiversité et une offre créative pour la conception paysagère. Aujourd’hui, il est possible de créer des espaces perméables carrossables afin de réconcilier usages et environnement (ex : parkings perméables). On peut également avoir recours à la création de plans d’eau et de fontaines. »Source

  • Récupérateur d’eau collectif

Dans son magazine « En direct, de novembre 2011, la commune de Petit-Quevilly, proposait à ses habitants : Source

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Cette initiative pourrait être introduite de manière collective avec une mise à disposition possible sur les territoires sociaux (bailleurs, privés).

Vient ensuite, la question de la végétalisation du territoire.  » Bien plus qu’un enjeu décoratif, le facteur végétal est pourtant devenu un critère attractif pour les citadins : les arbres sont un instrument de lutte efficace contre les îlots de chaleur. Obstacle physique à la lumière, ils sont aussi de puissants régulateurs de température puisqu’ils peuvent puiser en profondeur l’eau du sous-sol et émettre dans l’air de la vapeur d’eau.

  • L’architecture des bâtiments a aussi son rôle à jouer : le choix des matériaux, des couleurs, l’efficacité énergétique, leur végétalisation etc. autant de moyens permettant de réduire les besoins en climatisation.

Alors, à quand les « White roof  » Source et autres toitures végétalisées encouragées par les communes, la Métropole Rouen Normandie, les bailleurs sociaux et privés, au niveau local, extra local, depuis nos administrations, écoles jusqu’à nos immeubles et maisons ?

Espace vert, la très grande nécessité 

Les espaces verts sont indispensables à la ville, ils sont, par ailleurs, vecteurs d’attractivité économique et participent, de plein droit, à nos cadres de vie. Vous pouvez consulter cette parution Source dont est issue la capture d’écran suivante:

Screenshot_2019-06-16 Asterès-Les-espaces-verts-urbains-24-mai-2016 pdf.png

Observons in-situ, avec, atelier ‘specific, les éléments de réponse que propose la commune de Petit-Quevilly à propos de ses espaces verts comme « bien collectif gratuit ».

  • Atelier ‘ Specific # 1 – Jardin de la Chartreuse Saint-Julien
Garden chartreuse .jpg

Comment un jardin crée des conditions d’appropriation pour la faune et la flore ? IPL

Réduire l’émission de chaleur anthropique

La chaleur produite par l’activité humaine peut être réduite. On peut agir par exemple sur la mobilité :

  • Privilégier les transports en commun verts,
  • Limiter la circulation des voitures individuelles dans le centre-ville (proposer des alternatives pour les proches couronnes, agir avec la volonté d’une mobilité inclusive comme enquêtée dans  La sociologie de nos transports en commun et permettre la gratuité des transports en commun les jours de fortes chaleurs).

 

D’autres initiatives et engagements collectifs

  • Le Tri

#sitespecific a pensé à l’organisation de session de tri supervisé par moi-même (après avoir été parfaitement formée par l’association « Zéro déchet Rouen » par exemple). Lasse de constater que le tri n’est pas fait malgré les poubelles prévues, je reste compréhensive et mesure le peu d’infos hormis une affichette et le peu de sensibilisation depuis mon bailleur social dont disposent les habitants de ces logements alors l’idée m’est venue de prendre cela en main. A suivre!

  • Compostons !

Avec l’association Zéro Déchet Rouen, toujours, dans la lignée des actions citées ci-dessus, je pensais poursuivre avec le compostage collectif.

« En habitat collectif social, vous pouvez contacter votre bailleur. Celui-ci a été sensibilisé par la métropole et vous demandera probablement de vous regrouper à 10 voisin-ne-s.Si vous rencontrez des résistances, écrivez-nous.  Nous pourrons adresser une lettre de soutien à votre bailleur, et plus si affinités! »Source

 

Réunissons-nous pour proposer ces initiatives à notre échelle, organisons nos transformations de manière collective et citoyenne!

 

Isabelle Pompe pour #sitespecific, le 16 juin 2019.

C’est quoi émanciper ?

Le prochain évènement de #sitespecific est prévu pour le 29 juin, il s’agit du rallye ‘Specific # 1, le 1er rallye-photo de Rouen rive gauche.

Annonce agenda des sorties // Annonce Spectable// Annonce Sceno

Voici l’évènement Facebook

Son titre, « un rallye-photo pour émanciper la rive gauche » n’est pas sans rappeler le sous titre de ce blog. Mais c’est quoi émanciper et pourquoi avoir choisi ce verbe pour traduire une action, une somme d’actions de valorisation?

Tout d’abord, apporter une définition de manière imagée n’est pas apparu de façon immédiate puis, pourquoi ne pas lancer, comme nous l’avions fait avec le #rivegauche et T’étais où, là ? Rive gauche.

Alors, allons-y, tentons d’expliquer ce que nous voulons dire par là. Nous sommes allés chercher les définitions en provenance de dictionnaires afin de rester le plus grand public possible. Neutre ou presque dans notre approche, toutefois, le fond qui rejoint la forme ajoute parfois une dimension citoyenne, engagée, symbolique, à vous de voir…

Avec le fond emprunté aux dernières élections européennes, nous avons conçu celle-ci. En décor de façade, il s’agit de Petit-Quevilly et son territoire social, nous sommes tout à côté du métro ligne George Braque Station Place du 8 mai.

 

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Conception IPL, juin 2019

 

Nous avons poursuivi avec une image prise un samedi soir de mai 2019 sur le site de nos amis défricheurs, la #FricheLucien. Ce lieu s’illustre par son succès en chiffre, d’une part, 45 000 visiteurs du 29 avril à début juin 2019 (avant leur fermeture estivale et leur reprise du 19 juin). D’autre part, pour ses vertus émancipatrices pour la jeunesse qui trouve enfin un lieu qui lui ressemble, conviviale, tranquille, où on peut faire la fête sans se ruiner, où les filles peuvent venir sans être inquiétées, un site où l’ambiance a toujours été bon enfant. Une reine moderne trône. Nous pouvons voir se dessiner, en effet, celle qui se dresse et qui définit l’endroit avec exactitude: la Tour des Archives. Au vu de l’angle qui est le nôtre, nous sommes donc bien rive gauche.

 

Comme toute évolution, l’émancipation de cette rive se doit d’être soutenue, poursuivie pour mettre en avant une capacité à exister à partir de soi. Valoriser un site à l’aune de ses résidents, de ses architectures, de ses mémoires pour ne plus affaiblir la portée de ses propositions, déprécier ses initiatives, gaspiller ses énergies, ternir ses habitants et dégrader ses histoires.

 

 

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Conception, IPL, 2019

 

Au bas de cette image, se distingue, une jeune femme en veste de jean aux cheveux longs. S’émanciper, c’est grandir, mûrir, d’où la présence symbolique de l’échelle, c’est gravir, sortir. C’est devenir adulte et indépendant. Les préjugés sont, nous le constatons encore, mis à rude épreuve sur ce site permissif à toute parole citoyenne. Pourtant cette rive se voit enfin dotée d’un outil, puis d’autres naissent car les initiatives poussent, et son état de sous-rive par opposition à la rive droite, commence à tarir. Nous savons tous pertinemment que le quartier St-Sever est en proie à des gros travaux depuis quelques temps en raison principale: la future gare St Sever mais ce n’est pas, avec ce quartier, que l’émancipation de cette rive doit s’arrêter.

De plus, cette gare comme installation, comme prouesse, suffira- t ‘elle à renverser cet état de dépendance ?  La rive droite étant toujours celle qui impose le tempo, donne le La, ce pourquoi les aménagements urbains récents reprennent tous les copies de la rive droite et les dupliquent comme si le prolongement était naturel.

Il n’existe pas de miroir, elles ne sont pas jumelles, ne se complètent pas tant elles s’opposent depuis toujours.

 

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Conception, IPL, 2019

 

Pour refuser cette posture identitaire de sœurs ennemies et éviter de nourrir le conflit, la confrontation, #sitespecific propose, à la rive gauche via ses habitants, ses résidents ponctuels tels que ses salariés, ses rares touristes, donc tous ses citoyens, de se départir de ce modèle hiérarchique de l’exemplarité.

Elle existe seule, n’a pas de leçon à recevoir, elle fut longtemps, et ce, encore aujourd’hui désignée, affligée de l’étiquette de banlieue, d’ externalité. La rive gauche se moque de ce regard, de cette tutelle, à laquelle elle donnera tort sans cesse. Elle connait parfaitement ses contraintes, elle avance, bouscule, galvanise et finira par se libérer.

Alors, aidons-là puisque c’est notre rôle, à se sortir de ce clivage, à s’émanciper de cette existence subordonnée. Observons, avec une plus grande justesse, ce qu’elle nous cache, ce qu’elle nous dévoile, ce qu’elle peine à préserver. Elle est à nu en ce moment, en raison des très importants travaux, elle est malmenée, mise en danger au travers son économie locale, ses diversités que les tutelles aimeraient voir disparaître…Qui sait.

Alors, voici une manière simple et ordinaire de regarder, de saisir les bouleversements qui s’opèrent et de rester conscient que ces derniers ont déjà commencé, modifié, et qu’ils sont loin, voire très loin, d’être terminés. La rive gauche au regard des quartiers rouennais tel que Saint- Sever n’a pas fini de subir un lifting, en espérant ne pas le voir uniformisé.

 

RALLYE SPECIFIC AFFICHE # Jpeg

Conception, IPL, 2019

 

Vous le voyez, ici, du béton, beaucoup de béton rive gauche, cette fameuse tour que vous aurez reconnu qui scinde le ciel et qui vous sert de boussole, et l’intrusion de cette caravane qui nous rappelle que, sur ce territoire, nous venons tous du voyage …Et puis s’éparpillent des bus, des piétons, des maisons, des immeubles, de la belle verdure et un beau ciel bleu. Cette photographie fut prise l’an passé lorsque le collectif Lucien proposait son festival Parenthèse.

 

Sortons de chez nous, de notre individualisme pour montrer les visages de notre rive et lui permettre d’exister comme elle le souhaite sans avoir honte, sans avoir à complexer des regards condescendants qu’on lui jette.

 

Isabelle Pompe pour #sitespecific, 13 juin 2019.