La volonté de #sitespecific c’est de valoriser la rive gauche rouennaise en pensant à la diversification de ses offres et de ses publics. Concevoir les communes et les quartiers comme des lieux interdépendants car voisins permet de se penser de façon plurielle. Nous traversons ces endroits, nous en avons déjà entendu parler, avons déjà croisé, connaissons parfaitement ou pas du tout, c’est notre droit.
Cette rive représente un espace étendu qui exige davantage de solidarité entre ses territoires ce pourquoi la circulation des propositions gagnera, sans cesse, à être relayée. Notre cartographie ne nous invite pas au repli ou au systématique recours à Rouen rive droite. Il se passe, ici, aussi, des choses!
Nous avons pleinement conscience que des projets pourraient prendre forme. Nos territoires s’y prêtent. Ici, il existe beaucoup de bonnes intentions, toutefois, des inégalités sont perceptibles entre les communes et quartiers. Pourquoi Sotteville plus que Petit-Quevilly, pourquoi St Étienne et pourquoi pas…Non, tout ne peut être une question de cibles. Il semble, en effet, qu’il subsiste une profonde méconnaissance des attentes et surtout des populations qui composent ces « mondes ».
La rive gauche est une rive-monde.
Même si le nombre peut faire la force, des initiatives peuvent souffrir d’un manque de visibilité, d’un éloignement out tout simplement de ne pas être suffisamment relayées. Les « structures » ont, elles aussi, de gros efforts à faire en termes d’ouverture sur ces mondes, une politique tarifaire ne suffit pas.
Il n’y a pas de « The place to be », pas de domination ni d’ascendance, #sitespecific, nous soutenons, fermement, l’humilité comme valeur.Notre volonté est de tenter, de tester, à chaque fois.Nous partons quotidiennement, de façon simple, à la recherche, mettons en œuvre des propositions de rencontres sous des formes très diverses car nous souhaitons nous adresser à des citoyens/Habitants.
Certaines de nos actions se présentent comme des programmations plurielles. En effet, dans la mesure du possible, nos RDVs sont conçus comme des coups de projecteur sur des initiatives de la rive gauche rouennaise. En insérant, sur ces temps de rencontres, d’autres instants, à même de lutter contre l’isolement et permissif en termes de constitution du lien social, #sitespecific souhaite permettre, à la rive gauche, de faire « creuset commun« .
La volonté d’être prescripteur se fait, peut-être, sentir toutefois nous gardons à l’esprit que ce sont surtout des initiatives que nous encourageons.
Nos jours pluriels
Nous avons réfléchi à nos invitations en prenant compte des notions de mobilité inclusive et de confort.
Le samedi 28 septembre 2019 concerne la commune de Grand-Quevilly, à 14h le 2ème temps de partages autour de la question de la place de la femme rive gauche prend forme au Parc de la Roseraie de cette commune. Ensuite, le projet a invité ses participantes et participants a effectué une balade urbaine initiée par le festival d’architecture ZigZag, cette marche se nomme « Chemin de mémoire« . Un évènement gratuit qui requiert une inscription par contre vivement conseillée. Évènement
Sachant combien cela peut sembler difficile de faire le déplacement, de sortir de ses zones de confort, d’aller vers ce qu’on ne connait pas, nous avons nommé cet après-midi d’action: Passer de l’autre côté. Nous savons que s’enfoncer dans la rive gauche, aussi prêt cela soit n’est pas naturel...
Programmation jour du 28 /09
Il en a été de même pour la journée du 19 octobre 2019 où « Pousser la porte » devint le mot d’ordre avec deux propositions qui se succèdent, en toute logique, selon nous.
Un spectacle de danse Hip Hop « Tchatche » de la Compagnie de danse étantdonné dont le prix de l’entrée est de 7€ (tarif adulte) à 11h au théâtre Charles Dullin de Grand-Quevilly. Cette structure culturelle se propose d’accueillir les publics à un pique-nique sur le temps du déjeuner. Puis, c’est notre dernier RDV à 14h au Parc des Chartreux de Petit-Quevilly pour clore cette expérience thématique du moins, sous cette forme.
Programmation jour du 19/ 10
Nos mois pluriels
Nous avions déjà construit notre mois de septembre avec des RDVs en extérieurs qui nous paraissaient être de bons moyens pour découvrir des lieux, des projets. Nous avons relayé des informations, posté des éléments à même d’expliquer l’affiche « Franchir le cap« .
Trois dates, trois RDV la même semaine avec pour toile de fond, une présentation de saison théâtrale pour le théâtre Le Rive Gauche de Saint-Étienne-du-Rouvray, la création d’un labo photo argentique impulsé par la MJC Rouen Rive gauche et enfin un vernissage au FRAC (Fonds Régional d’art contemporain) situé à Sotteville-lès-Rouen, sur lequel nous reviendrons pour un article consacré à cette exposition, « Remake« .
Nous refusons que la culture s’installe avec des discours pour des publics initiés. Ce pourquoi, nous sommes, nous-mêmes, testeurs de ces démonstrations.
Pour « Franchir le Cap », nous avons favorisé des horaires en début de soirée afin de gagner en souplesse de visite surtout au regard des transports en commun.
Nous sommes convaincus que les habitants représentent des ressources qui ne sont pas suffisamment prises en compte par les lieux eux-mêmes soit par l’ajout de frontières géographiques et symboliques.
En effet, nous sommes lasses de comprendre que l’origine géographique des publics ne soit pas encore une priorité pour le FRAC Normandie Rouen, par exemple. A l’entrée, aucune question n’est posée sur la provenance, comment, dès lors, mesurer avec justesse les freins au déplacement et tenter de pallier à ces derniers ? Quelle considération est alors faite des publics et quelle diversification ? Et si la question ne se pose pas c’est que peut-être l’élément de réponse est connu.
Quel est l’intérêt alors d’une inscription territoriale sur la rive gauche si ce ne sont que des rouennais de la rive droite qui s’y rendent ?
Entrée de saison culturelle rive gauche, septembre
Après ce focus jour, nous réaliserons des programmes mensuels afin de souligner que des RDVs se suivent et ne se ressemblent pas…La volonté d’ouvrir est une priorité.
Le mois d’octobre est ainsi représenté avec notre CleanWalk (ramassage solidaire de déchets sauvages) du dimanche 06 octobre et notre dernière rencontre’ Specific du 19.
Programme octobre #sitespecific
Novembre est en cours de finalisation. Nous sommes, en effet, dans l’attente de confirmation pour l’organisation de deux évènements: Le Rallye’ Specific # 2 dont la thématique est « Mémoire & Attachement ». Il pourrait être proposé à vélo et nous aimerions vivement le voir émerger tout début novembre, sur le 1er week-end idéalement.
De plus, le 1er RDV du Groupe exploratoire nous parait important et requiert du temps, ne serait-ce que pour constituer le groupe lui-même.(+ d’infos: Les actions en 2019)
Affiche du lancement du Groupe exploratoire
Conjointement à ce dernier, nous aimerions lancé un travail d’investigation sur la jeunesse et le genre à Petit-Quevilly…Qui verra peut-être le jour en cette fin 2019 ou en 2020…
Un dernier trimestre passionnant en perspective, A suivre!
Isabelle Pompe, le 17 septembre, pour #sitespecific
Ce projet repose sur la tentation de considération de nos situations sans jugement de valeur. Ces dernières demeurent distinctives. Comme vous, la petit-quevillaise qui porte cette initiative, évolue au sein d’un endroit que l’on jugera de toutes les façons mais qu’il convient de communément nommé « spécifique « .
SITE SPECIFIC c’est une histoire de vies,
Avant d’être là, la résidente du territoire social questionné par le projet, habitait ailleurs. Dans un immeuble hétéroclite, dans des lieux singuliers, des endroits étroits parsemés et entourés de voix étrangères, cette passagère est restée près de 15 ans au sein d’une autre région et avant cela encore dans une autre, et pire, son département de naissance se situe encore ailleurs, au point même d’avoir passé son enfance à l’étranger.
Est-ce un problème ?
Non, car SITE SPECIFICc’est une histoire d’habitants,
Elle vous imagine alors même qu’elle vous observe. Peut-être, vous vous dites que cette fraîche petit-quevillaise est une résidente en toc. Une touriste, qui n’est pas de là, une non normande, elle est ce « fake » selon certains d’entre vous mais elle ne croit pas à cette histoire de terre d’origine qui viendrait légitimer sa présence et donc assurer la crédibilité de sa parole. L’étrangère fut exclut. Non pas par ses voisins mais par des instances, des incarnations du pouvoir qui lui ont signifiés, très tôt, ici, qu’elle n’était pas du sérail, qu’elle n’était pas « du coin » et qu’elle pouvait faire peur. De plus, son territoire d’habitation précédent lui fut reproché, son secteur professionnel également. Pas de bol…
Alors qu’elle était en train de valider sa VAE en Normandie, elle rencontre Le Petit-Quevilly et son lycée Élisa Lemonnier, lieu de son jury pour son Bac Pro commerce, en 2014.
Il faut vous dire que cette habitante s’est construite une carrière en dents de scie non sans euphémisme à partir d’un bac littéraire, dès 1998. Pour faire court, non pas par défaut d’ambition mais parce que les secteurs qui lui ont ouvert leurs portes lui ont fait payer assez cher sa singularité. Cette dernière repose sur sa volonté de préserver son indépendance de pensée, son éthique et sa solidarité.
Bref, elle reprit ses études en 2013, du Bac Pro commerce, BTS MUC (en VAE les deux), en passant après par le CNAM (Conservatoire National des Arts et Métiers) pour valider une 1ère année du titre RNCP II « Responsable en gestion », elle s’est tournée ensuite, en 2016, vers l’Université de Rouen Normandie avec le Master « Direction de projets et d’établissements culturels »…C’était sa réponse à l’installation du chômage en profondeur dans sa vie. Elle s’est tournée vers cette occupation du temps, pour apprendre des choses, du nouveau, de l’inconnu…
C’est au cours de cette période, qu’elle rencontra le territoire social de cette étude à deux reprises…En 2014 et la 2ème c’est un an plus tard.
Lorsqu’elle y emménagea en octobre 2015, elle était soulagée. Cette adresse lui apparue comme symbolique, la fin des galères financières, une indépendance assumée. Enfin tranquille, se disait-elle, là, à ne rien devoir à qui que ce soit.
Alors c’est depuis cette adresse, qu’elle se dirigea chaque jour ou presque au CNAM de Mont- Saint-Aignan en cours du soir et du jour et à celui d’Évreux en 2015/16. Elle s’agace d’entendre parfois que son accent aurait changé comme si cette distinction sonore participerait activement à une assimilation.
Elle n’est pas de là, et n’a jamais été où que ce soit pour être intégrée à la « culture » d’un territoire parce qu’elle sait que son histoire est une somme de diversités hors-sol et rejette donc cette ascendance. Elle ne néglige pas, ne porte pas jugement de valeur sur ce territoire exsangue qui est le sien et sur ces gens qu’elles croisent quotidiennement qui semblent exister dans une profonde détresse.
Elle s’est sentie seule, loin d’elle-même et fatiguée, en septembre 2018, lors de la soutenance de son mémoire de master 2, et qu’elle entendit qu’elle ne relevait pas du monde de la « culture », et que lui fut reproché son côté passionné et militant.
Il en faut du courage, il est vrai, pour tenir le coup, ici, dans cet endroit où tout semble loin. Cette résidente n’est pas une héroïne, elle observe et remarque. Elle comprend, assez tôt, que la rive gauche est souvent renvoyée à un endroit maltraité qui questionne voire tutoie la laideur. Un lieu pourtant auréolé d’une image attachante qui possède une histoire humaine foisonnante. C’est donc dans ses conditions émotionnelles que le lien qui lit cet endroit à cette habitante se développa.
SITE SPECIFIC, c’est une histoire de solidarités,
Lasse d’écouter et de subir les remarques négatives, les regards condescendants portés sur ces communes jugées trop pauvres, trop « sociales », trop marquée par des histoires « de diversités », cette résidente récente ouvre pourtant les yeux, chaque jour, avec émoi sur cet endroit non touristique. Elle y voit des ressources insoupçonnées mais non valorisées car selon les pouvoirs publics elles n’apportent rien au marketing territorial mis en œuvre. Elle opte pour une solidarité, une attitude responsable et lors de la mise en place d’une exposition nommée ODC (Ordre Des Choses), en 2018 (elle est photographe autodidacte depuis 2013), à la bibliothèque François Truffaut du Petit-Quevilly, elle décida de questionner les « rues » de la commune. Elle organisa un rallye photo ouvert à tous, baptisé, pour l’occasion, « la rue est une mine d’or « . Non sans humour, le groupe s’est attelé à photographier la dimension narrative du Petit-Quevilly à travers ses rues. Nous nous sommes penchés naturellement vers la photographie sociale. Cet espace de référence est, perceptible, au 1er coup d’œil, comme un territoire désargenté où des familles résident dans un grand nombre de logements, collectifs comme individuels, « en difficulté. »
Puis, cette citoyenne proposa un autre atelier photo avec l’idée d’aborder la question de la laideur: « raconter le moche « . Celui-ci s’organisa avec le Collège Fernand Léger du Petit-Quevilly via une classe de 3ème et son professeur François Bonnardot. Force fut de constater que la perception de ces collégiens de leur territoire d’habitation était pour le moins « négative ». Un territoire d’ennui que l’on subit et qui renvoie à l’échec, à l’endroit où il ne fait pas bon rester au risque d’être stigmatisé.
SITE SPECIFIC, c’est un sentiment de maltraitance en écho,
Après avoir vécu de nombreuses années à Paris et sa région, avoir exercé des professions diverses, elle a mené une vie plurielle. Régulièrement sous la contrainte, cette résidente de ce territoire social a du réajuster beaucoup de ses exigences. Hier, une vie de déracinée qui s’ancre sur des espaces circonscrits. Un temps passé à occuper des fonctions de subalternes, d’employés dans des secteurs parfois très excluants. Aujourd’hui, après avoir été dans l’obligation sociale de quitter Paris en 2013, sa vie reste précaire.
De plus, la pression des injonctions sociétales pèsent sur ses épaules, c’est une femme indépendante qui n’a plus 20 ans. On ne cesse de lui souffler cette remarque, depuis sa venue à Rouen, en 2014. Cette terre d’accueil, rue St Sever fut rude, peu de rencontres ou timides, peu de curiosité. Certes mon territoire d’inscription actuel ne m’a pas permis de sortir du chômage mais depuis mon accès au parc du bailleur social Seine Habitat, ma situation sociale me permet de survivre décemment.
Ici, un story telling ? Euh, elle ne sait pas, c’est aussi une façon de faire connaissance et de vous signifier que l’intérêt qu’elle porte à sa commune est de plusieurs ordres. Son attachement pour le Petit-Quevilly est prégnant. Elle l’a visité, arpenté, photographié et continue toujours d’en parler avec bienveillance et de contrecarrer les paroles malheureuses et stigmatisantes à son endroit.
Pourquoi?
Entre incompréhension et flou entretenu, elle constate que cette ville est en difficulté d’un point de vue communicationnel. La mairie via ses supports produit des images qu’elle ne reconnait pas dans son quotidien. Ceci, selon elle, induit un message d’erreur. L’énoncé de la commune est problématique, il semble déconnecté du « réel ». Cet espace concret voit son image altérée. Son histoire, non transmise et non abordée semble traduire un malaise. De ce fait, en raison de ce défaut de transparence et « d’honnêteté », elle voit sa commune en dehors de ses vrais « clous », à côté de la plaque. Le Petit-Quevilly et ses habitants évoluent sous un regard extérieur qu’elle réprouve. Excédée d’avoir à entendre que Rouen rive gauche, c’est la déjà banlieue et de mesurer combien Le Petit-Quevilly c’est, en gros, la loose, elle s’est sentie d’un coup très proche de ces endroits. Une ressemblance quasi gémellaire s’est donc installée entre sa situation personnelle, sociale et professionnelle et ces territoires.
Voilà pourquoi, cette habitante militante mène ce projet, à bout de bras, avec des soutiens fragiles et sans aide financière. L’envie d’une réhabilitation ? La volonté de défendre ces gens qu’on ignore? Une intention citoyenne de regarder de près ce qui n’est pas rendu visible. Permettre un meilleur accès à l’information quant aux risques auxquels nous sommes exposés pour parvenir à aider ces habitants en termes de prévention, de prise de conscience.
Travailler sur ses ressources inactivées telles que la mémoire ouvrière, ré-interroger le territoire à l’aune de ce qui est ignoré, méprisé, caché car ne relevant pas de ressources dignes d’activer l’attractivité. Repenser un territoire social en considérant les histoires des habitants sans les opposer aux capitaux extérieurs. Étudier l’approche du citoyen en tant que partie prenante…
Après avoir questionné La sociologie de nos transports en commun, et relevé les notions de « mobilité inclusive » ainsi que le type, encore genré, de trajets que propose l’offre des transports en commun en banlieue ou en ZUS. Nous poserons notre regard sur la place de la voiture au sein de nos territoires sociaux.
Alors que nous la savons décriée, parfois interdite des centre-villes et que notre regard change sur elle, nous pouvons, cependant, la considérer comme objet social total.
Pour la réalisation de la 1ère partie de cet article, j’ai repris les propos tenus par Yoann Demoli lors de son entretien avec Lucie Fougeron pour le journal l’Humanité du 24 janvier 2019 (Source) afin de mesurer leurs interactions avec mon propre récit de vie.
Yoann Demoli et Pierre Lannoy, « Sociologie de l’automobile » paru le 31 janvier 2019 aux éditions La Découverte.
Notre relation à la voiture s’est aussi construite en fonction de nos territoires d’habitation. Une des premières raisons à cela tient au caractère « divisionnel » de la France: un centre -ville (nous pouvons l’observer avec Rouen et son hyper centre-historique), une banlieue et plus loin, un espace rural.
Cette structuration urbanistique impose une adaptation. L’éloignement du centre et la présence ou non de transports en commun engendrent la nécessité de la voiture. Ce constat implique une inégalité quant au poids que représente les dépenses supposées: le coût de la voiture(achat/entretien) est très lourd et les conséquences, telle que l’impossibilité financière de procéder à une réparation, peuvent être préjudiciables.
1. La voiture comme bien symbolique
Schéma –Les usages sociaux de l’automobile : concurrence pour l’espace et accidents par Luc Boltanski, 1975
Le sociologue Luc Boltanski, dans cet article de 1975, parvient à réfuter le fait que les groupes sociaux aient un usage homogène et semblable de l’automobile. La recherche de Boltanski confère à la voiture un autre statut, elle n’est pas un objet de consommation. Elle est un bien symbolique au sens où les formes de concurrence ne seraient pas réglées par des variables de prix.
La voiture comme pratique culturelle
Yoann Demoli souligne qu’il existe désormais une uniformisation croissante au regard du design des modèles proposés à la vente par les constructeurs. (Une standardisation que nous pouvons rapprocher de celle de nos centre-villes avec l’omniprésence des mêmes enseignes).
Selon lui, « la différenciation sociale se fait aujourd’hui par l’achat de véhicules neufs qu’il convient de changer tous les deux ans. »
C’est typique des professions libérales et des cadres supérieurs.
Des questions se posent: Quel rapport à la consommation est entretenu par ces populations ? Au gaspillage, au caprice? Quel part représente la LLD (location longue durée) avec ses avantages sur le plan fiscal, par exemple?
Il ajoute, qu’aujourd’hui, « la distinction, ce n’est plus d’avoir une ou plusieurs voitures c’est de ne pas en avoir ».
Pour une certaine frange des classes moyennes et supérieures urbaines.
Je ne possède pas de véhicule. Comme nous l’avons abordé lors de notre article « la sociologie de nos transports en commun ». Cet état de fait tient, aussi, à un défaut de ressources financières. De plus, je ne relève pas de la classe moyenne mais plutôt précaire et je ne me considère pas comme « urbaine ».
Il précise, que « la voiture, en tant que pratique culturelle, correspond à des goûts et à des dégoûts, par lesquels on se positionne dans l’espace social« .
La voiture ne suscite pas de goût ou de dégoût en ce qui me concerne, ce qui me touche ce sont les comportements des automobilistes.
Pour comprendre les explications qui vont suivre, Yoann Demoli aborde les notions de capital social et de capital culturel.
« Quand on a un capital culturel plus important, on tend à « snober », voire mépriser la voiture. »
Revenons sur ce notion avant d’interagir.
Le capital culturel peut prendre la forme de biens culturels qu’un individu possède comme les livres, CD & Vinyles, films (supports & fichiers)…
– il peut prendre aussi la forme de compétences culturelles attestées par des diplômes scolaires (bac, etc.)
– enfin, il peut être « incorporé », c’est-à-dire qu’il fait partie de l’individu lui- même en tant que dispositions apprises lors du processus de socialisation et qui sont mises en œuvre lors de différentes activités (consommation de biens culturels comme une pièce de théâtre, échanges langagiers par exemple à l’école, activités scolaires, etc.)
Durant toute ma jeunesse, j’ai eu accès à des biens culturels grâce à mon père, puis, au fil du temps, je me suis constituée une bibliothèque, vidéothèque, dvdthèque…
J’ai repris un cursus universitaire il y a trois ans (en 2016) après une VAE. Avant 2013, je disposais d’un bac littéraire. Je suis diplômée d’un master 2. (Je possède donc des compétences culturelles)
Processus de socialisation:
Pendant de nombreuses années, je n’ai pas eu accès à des structures culturelles. La raison: je résidais dans des communes dépourvues de salles de spectacle, de cinéma voire de bibliothèque et les seules disponibles étaient éloignées sans réseau de transport en commun. Les choses auraient pu considérablement s’améliorer avec mon arrivée en région parisienne, à 20 ans, avec un bémol toutefois, j’ avais un travail précaire et n’avais pas d’argent pour prendre le RER. J’ai pu profiter de l’offre culturelle pléthorique parisienne à mes 25 ans grâce à un emploi stable et à mon emménagement à Paris.
Je n’ai pratiqué aucune activité artistique à l’école. Je suis autodidacte en ce qui concerne la photographie.
« Au travail et au travail domestique : cumulés, cela représente 80 % des déplacements en France.
La voiture est maintenant l’outil et le prolongement du travail.
Cela concerne des territoires qui se sentent isolés, où la suppression de services publics complique les trajets et où l’offre de transports en commun ne convient à aucun actif, quand elle n’est pas nulle. »
Remarquons la description qui est faite de ces territoires. Sans que cela ne soit précisé ou de manière implicite. Selon vous, qui réside sur ces espaces isolés où l’on supprime les services et où l’offre de transport en commun « ne convient à aucun actif » ?…Nous. Ce pourquoi, lorsque nous sommes actifs, nous sommes dépendants de la voiture. De plus, les personnes précaires sont confrontées à une forme « d’activité contrariée » en raison de leur sujétion aux transports.
Depuis 2015, je suis au Petit-Quevilly et je constate une gêne dans mes déplacements. Cette nouvelle adresse a pu me donner à vivre une forme d’éloignement.
Les habitants de la ville-centre, cadres et professions intermédiaires ont, eux, une part de trajets longue distance énorme : pour eux, la voiture est aussi l’engin du loisir.
L’usage du véhicule n’est pas du même ordre pour les résidents des ville-centre. Ils ont tout sur place: des services, commerces, un réseau de transports en commun, en général, adapté et efficient… Ils peuvent utiliser les transports doux, la notion de distance est parfois relative. Ils ont les taxis, les vélos en location…
Ils sont, au regard de leur territoire d’habitation, privilégiés. De plus, ils sont cadres et professions intermédiaires, détiennent donc les ressources financières suffisantes pour faire davantage de distances pour se divertir.
L’opposition est prégnante, les uns travaillent – la voiture est leur outil et le prolongement de leur travail- tandis que les autres se servent de leur voiture pour se promener…Je suis embarrassée par cette approche.
Au Petit-Quevilly, je travaille, en photographie sociale, sur la disparition du piéton. En effet, je suis dehors, chaque jour ou presque, et je croise en très grands nombres des voitures et très peu de piétons. Même pour des petites distances, les gens prennent leur voiture. Pourquoi ?
La question du genre
« les trajets des femmes font exploser les distances parcourues : accompagner les enfants, faire les courses… tout ce travail domestique s’ajoute aux trajets liés à leur emploi.
La division sexuée du travail se poursuit en voiture »
Quand ces femmes ne sont pas précarisées, quand elles ont un emploi avec des ressources financières suffisantes pour acquérir un véhicule…Et pour celles qui vivent en couple: à un défaut de parité salariale s’ajoute une pression sociale et familiale: pour la plupart, les charges inhérentes au foyer leur incombent.
En outre, rappelons-nous que, 85% des foyers monoparentaux sont féminins.
Sociologie de l’accident
« Ce sont les membres des classes populaires qui meurent sur la route : parce qu’ils roulent plus au volant de voitures en mauvais état et sur des départementales, là où la mortalité est la plus forte. »
22 % des tués sont des ouvriers alors qu’ils constituent 14 % de la population de plus de 15 ans…
Le poids des voitures dans les classes populaires compte aussi :
Plus légères car
Plus anciennes
Plus petites
Elles subissent des dégâts plus graves en cas de choc avec les véhicules récents, plus lourds, prisés par les classes supérieures.
Je m’arrête un instant, je suis locataire du bailleur social: Seine Habitat. Dans ma rue, sur le parking privé de la résidence et sur ceux qui sont adjacents à ma rue, soit environ 40 véhicules, sept sont des berlines/coupés allemandes récentes. Au total, pour toute la rue (Joseph Lebas), on arrive à 75% de voitures de + de 5 ans. Deux exceptions : une Citroën visa (dernière année de production: 1988) et une Ford Taunus (dernière année de production: 1994). Sinon, des véhicules Low cost côtoient les modèles Ford Ka, C2, Twingo…
Sociologie de la pollution
« On a observé que les biens deviennent problématiques quand les pauvres y accèdent. En France, on commence à parler massivement de ces « externalités négatives » dans les années 1970, quand sa diffusion verticale s’achève » selon Yoann Demoli.
La diffusion s’est verticalisée à partir de l’instant où tout le monde, toutes les catégories sociales, ont pu voir accès à une voiture.
En considérant la voiture comme bien symbolique, comme nous l’avons vu précédemment. Elle relève non plus de la sphère des marchandises (sphère englobée) mais d’une sphère englobante comme celle de la culture o par exemple. Des effets de transformations, de réaction se sont déroulées. De ce fait, le phénomène des externalités négatives est à entendre par, chaque fois qu’une transaction est opérée dans une sphère englobée, elle produit des conséquences sur le sphère englobante, d’où des réactions de rejets, de dégoûts, de problèmes.
Taxe carbone & Diesel
La mobilisation des Gilets jaunes a pour motivation de départ le rejet de l’augmentation de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Elle s’élargit rapidement à d’autres revendications fiscales et sociales ainsi que politiques.
Les dernières mesures comme la taxe carbone concernent les véhicules que conduisent majoritairement les catégories modestes des zones périurbaines et rurales.
« Les véhicules diesel ont été responsables de 385.000 morts prématurées liées aux émissions polluantes du secteur des transports en 2015, selon une étude de l’ICCT, l’ONG à l’origine des révélations sur le « dieselgate. » Source
Dans un article du 02 février 2019 , nous apprenons qu’un peu plus de 36 % des ventes (neuf) de véhicules concerne les diesel.
Observons un carte de la répartition des diesel en France
Le département de la Seine- Maritime est représenté à hauteur de 61%. Nous n’avons pas, toutefois, accès à ce chiffre en détail en fonction des territoires d’habitation.
Ancienneté du parc automobile en France
« Le parc automobile français compte désormais 32,39 millions de voitures particulières. Si elles sont de plus en plus nombreuses, les voitures françaises sont aussi de plus en plus vieilles: presque 9 ans en moyenne« . Source BFM 2017
« Or, nombre d’études montrent qu’elles polluent moins que les catégories supérieures, car elles conduisent moins et limitent leurs déplacements du fait des coûts associés.
Les actions contre la voiture dans les hypercentres ciblent les véhicules des banlieusards pour leurs nuisances, or, ce sont plutôt les classes populaires qui les subissent là où elles vivent, alors même qu’elles y contribuent assez peu. »
Avant de définir la « les classes populaires », Yoann Decimo nous précise que ces classes résident en banlieue.
Classes populaires ?
» Une chose est certaine : on ne parle plus de « classe ouvrière ». C’était une construction politique devenue identitaire…C’était loin. Par contre on entend tous les jours des expressions comme « milieux populaires », « quartiers populaires », « la droite populaire », « familles populaires », « l’électorat populaire ». Les auteurs de cet ouvrage observent très justement que « c’est une notion qui met à distance ».
On ne répond pas « moi je suis classe populaire » aux questions posées sur l’appartenance sociale, nombreux sont aujourd’hui celles ou ceux qui se sentent « classes moyennes ».
La classe populaire ressemble davantage à un « grand ensemble » – « ouvriers+employés+petits indépendants+petits agriculteurs... » Source
Classes moyennes ?
Le sociologue, Serge Bosc privilégie l’approche en termes de catégories socio-professionnelles pour la définir. Il y a donc deux groupes principaux qui forment cet ensemble, très hétérogène, rappelons-le, que sont les classes moyennes.
Ce sont les petits indépendants et artisans, et les professions intermédiaires, tels que les enseignants du secondaire, par exemple. A cela s’ajoute une partie des cadres, l’ensemble des « petits » cadres du privé. Source
3. Un amour populaire de l’automobile
« Il y a aussi un amour populaire de la voiture : elle permet d’incarner la virilité, dans un monde ouvrier en crise ; de s’affirmer en tant qu’adulte quand on est jeune : les jeunes ouvriers sont ceux qui dépensent le plus en voitures en acquérant, d’occasion, des berlines allemandes ».
La voiture incarne l’émancipation, procure un sentiment de liberté. Elle est aussi un bien symbolique car elle nous renvoie à des images, des esthétiques. Les prouesses en termes de motorisation, de vitesse engendrent des sensations physiques recherchées. Le design, les formes, le bruit attestent de notre rapport très sensible, voire sensuel avec ce mode de déplacement. Néanmoins, je n’aborderai la notion d’attachement notamment aux marques. La voiture est parfois vécue comme l’extension de nous-même, elle s’inscrit dans notre histoire personnelle et collective. La culture populaire en a fait un personnage de cinéma, une héroïne…
Voiture & culture populaire
Les voitures et le cinéma, c’est aussi une très longue histoire commune. Alors que des véhicules doivent leur notoriété au cinéma et aux séries, certains deviennent des icônes et d’autres, des modèles cultes.Modèles cultes du grand et petit écran
Je vous invite à visionner cette vidéo de l’émission Blow Up de Luc Lagier. Vous serez d’accord ou constaterez sûrement des manques et souhaiterez apporter l’inscription voire la réhabilitation tant votre attachement à certaines scènes de films est grand…
CINÉMA & Bullitt
Bullitt met en scène la plus célèbre course poursuite de l’histoire du cinéma avec Steve McQueen au volant de la Ford Mustang Fastback GT de 1968. Ce film fut un succès populaire, en France, avec plus de 3 millions de spectateurs …
Bullitt est le 5 ème Film le plus rentable aux États-Unis en 1968 (budget: 5,5 millions de dollars/ Recettes: 42,3 millions de dollars)
Télévision
Avant de vous parler de l’audience télévisuelle, je voudrai revenir à la sociologie, grâce, notamment à l’ouvrage, Sociologie de la télévision de Brigitte Le Grignou et Erik Neveu paru en 2017 aux éditions de la Découverte.
« Selon le critère de la durée la télévision est loin d’être morte puisqu’elle représente la troisième activité de l’existence humaine en France, après le travail et le sommeil, avec en moyenne 3 h 50 par jour et par personne, sans compter les produits de télévision, de plus en plus nombreux, diffusés sur d’autres supports (ordinateurs, smartphones). » Source
Audience télévisuelle & Bullitt
En ce soir du 27 janvier, un dimanche de 2013, soit 45 ans après sa sortie, le film Bullitt est diffusé sur Arte. sachez que cette chaîne a enregistré, pour l’année 2017, une audience moyenne qui oscille entre 1 et 1,6 millions de téléspectateurs.
Ce soir là, elle attire 1, 1 millions de téléspectateurs, ce qui la place après les mastodontes que sont TF1/ M6 mais son score est tel que le magazine cité en source titre son article: Succès pour Bullitt sur Arte. (Audience source)
Car chase – Course poursuite au cinéma
Après le décès de Steve McQueen en 1980, Jean-Paul Belmondo lui rendit hommage dans le film policier Le Marginal (1983) de Jacques Deray, en exigeant qu’une poursuite de voitures semblable à celle de Bullitty soit intégrée. Belmondo conduisait lui-même la voiture du poursuivant, une Ford Mustang d’un vert pomme métallisé, semblable (même si un peu plus foncé) à celle de Franck Bullitt. Le Marginal est d’ailleurs sorti 15 ans après Bullitt.
La course-poursuite a inspiré trois autres morceaux de bravoure automobile célèbres : ceux de French Connection, The Seven-Ups (Police Puissance 7, 1973, avec Roy Scheider) ainsi que Le Casseavec Jean-Paul Belmondo…
Dans le film Drive (2011), une course poursuite entre le héros conduisant une Mustang et des « méchants » en Chrysler 300C est une référence très claire à la course poursuite de Bullitt.
En 2001 et 2008, le constructeur Ford commercialisa une Mustang « Bullitt » en série limitée.
En 2003, la série Fastlane rend un hommage à Steve McQueen en présentant une réplique identique de la Ford Fastback.
En 2018, pour le cinquantième anniversaire de la sortie du film, Ford présente au salon de Détroit une Mustang Bullitt. Essai Mustang Bullitt 2019
La voiture exposée
La voiture exerce un très fort pouvoir d’attraction, de fascination. L’exposition AUTO PHOTO à la fondation Cartier nous emmène vers des dimensions sociologiques, technologiques, anthropologiques et historiques…Cet évènement (20 avril au 24 septembre 2017) est intéressant à questionner d’une part, car cette fondation avait déjà rendu hommage à la voiture il y a 30 ans avec Hommage à FERRARI (Source) et d’autre part pour la question de la réception des visiteurs.
Hommage à Ferrari s’est déroulée du 22 mai au 30 août 1987. Cette exposition a touché beaucoup de monde, » aux dires de Marie-Claude Beaud, Directeur de la Fondation Cartier, 1987. C’était à Jouy-en- Josas sur une scénographie d’Andrée Puttman que l’hommage s’est déroulé.
Un visiteur se souvient:
» C’était à Jouy-en-Josas, en Essonne. J’avais 7 ans. Pas de photos. Mais quelques souvenirs intenses de cette balade en famille incroyable. Des voitures magnifiques présentées de manière surprenante, dans un parc naturel superbe.Je me rends compte que j’ai eu à l’époque une grande chance de pouvoir la voir. (les voir !) » (Source)
AUTO-PHOTO
« La voiture est un objet de fantasmes, de contemporanéité, de pouvoir, de vitesse, de violence, de désir, de sexe, de technique… »
« À travers la photographie et le cinéma, l’exposition Auto Photoveut revenir sur toute l’histoire de la photographie à travers le prisme de l’automobile ». (Source)
Ce seront 500 photos de 100 photographes historiques et contemporains originaires des quatre coin du monde. Source Ici un Diaporama
Je ne présenterai pas de photographies de cette exposition, je vous invite donc à consulter le site de la Fondation Cartier
« Au final une belle expo explorant de nombreuses histoires de la voiture. Certes cela change un peu de ce que l’on peut voir dans le monde des bagnolards, dans les villages d’artistes comme celui de Retromobile. une expo très orientée art, mais avec des niveaux de lectures ouverts à tous. » (Source)
» Avec « Autophoto », la Fondation Cartier réussit une performance : revoir les grands auteurs de la photographie et nous embarquer dans des histoires de bagnoles improbables, drôles et tragiques. Comme celle de la construction de la Turtle, au Ghana, la série vernaculaire de fiers propriétaires européens qui prennent la pose devant des voitures ou la série montrant les Allemands de l’Est réfugiés dans les coffres pour passer à l’Ouest, par Arwed Messmer… » (Source)
Les différentes lectures qui sont faites de cette exposition permettent de mettre en exergue un niveau de vocabulaire des « bagnolards » à « bagnole » à celui « série vernaculaire », en passant par « expo très orientée art » qui se veut rassurante « niveaux de lecture » « accessible à tous ».
Et vous, l’avez-vous visitée ou auriez-vous eu envie d’y aller ?
Je n’avais pas envie de clore ce chapitre « voiture » sans citer la photographie américaine et son rapport singulier à ce mode de déplacement. Le photographe Lee Friedlander, c’est une certaine vision, de l’Amérique comme territoire social, offerte par la voiture. (Source)
crédits Lee Friedlander
Selon lui, « lesvoitures éloignent les gens les uns des autres ».
Bien que Friedlander ait visité les villes en décroissance de la Rust Belt (ceinture de la Rouille est le surnom d’une des régions industrialisées des États-Unis en déclin), il ajoute: « in almost every case the car is a kind of shield that deflects empathy.”
« Dans presque tous les cas, la voiture est une sorte de bouclier qui détourne l’empathie »
Cet article trouvera une suite, très prochainement, avec l’approche des pratiques qui concernent des territoires sociaux telles que le Tuning, la mécanique sauvage où encore celle des « Big Bangers » (le crash de voiture comme art de vivre) observées par le photographe David de Beyter …
Pour faire suite à notre article précédent: Territoire social & art # 1, nous allons questionner différentes notions.
PREVIOUSLY
Nous avons abordé le mécénat d’entreprise tel que Rubis Mécénat cultural Found. Mécénat porté par le groupe Rubis dont l’un des sites se trouve être exploité au Grand-Quevilly (2305 BD Stalingrad).
Le sujet qui nous intéresse est la commande passée par ce mécène à un artiste de renommée internationale, à savoir le photographe belge Geert Goiris. Cette même commande a fait l’objet d’un partenariat unique avec le FRAC (Fonds régional d’Art Contemporain) Normandie Rouen installé à Sotteville lès Rouen. Cette initiative a pris la forme suivante:
Une exposition au Frac Normandie Rouen (du 09-12- 2017 au 14 -01-2018)
Deux installations d’envergure dans le Port de Rouen
Une parution chez Roma Publications.
Ce qui a attiré notre curiosité c’est la manière dont était relatée cette collaboration. Pour cela, nous avons retenu trois articles parus dans: Paris Art, L’œil de la Photographie et Réponses Photo.
Puis, nous avons extrait ceux -ci : « Documenter, portée à la vue, sites méconnus, cachés des regards ainsi que la préposition « malgré » et la locution adverbiale « au contraire » dans les phrases « sites méconnus malgré leur rôle majeur » (article 1) et « Au contraire le sujet est dans les temps de latence… (dernière phrase de l’article 3) »
Et enfin les annotations suivantes pour désigner l’artiste au regard de ses expositions et du format de ses œuvres: XXL, monumentale, expositions poids lourds.
Temps II
Restituons le contexte géographique de cette proposition artistique. En effet, sur notre territoire social est implanté Rubis Terminal.
De qui s’agit-il? Et quelle est, brièvement, son histoire ?
Localisation du site Rubis Terminal au Grand-Quevilly
RUBIS TERMINAL
« Rubis Terminal est le leader européen indépendant dans le stockage de produits pétroliers, chimiques, agroalimentaires et des engrais.
Rubis Terminal est une filiale du groupe RUBIS, un des leaders européens indépendants spécialisé dans la distribution de produits pétroliers (carburants, GPL…) et le stockage de produits liquides (pétrole, produits chimiques, produits agroalimentaires, engrais).
Créé en 1877, Rubis Terminal, anciennement Compagnie Parisienne des Asphaltes (CPA), dispose en 1992 d’un million de mètres cubes de stockage à Rouen et Dunkerque, dont la localisation en façade maritime et les connexions aux principaux pipelines français offrent un enjeu stratégique majeur dans la chaîne logistique des hydrocarbures et produits chimiques en France.
RUBIS TERMINAL & Rouen
2016 Mise en service de capacités supplémentaires à Rotterdam (35 400 m3), Anvers (45 000 m3) et Rouen (75 000 m3)
2017 Construction de réservoirs double enveloppe béton à Rouen 2 X 9 500 m3, mise en service de 30 000 m3 à Anvers
2018 Mise en service de 22 000 m3 en engrais à Rouen. » Source
L’Art est engagé pour la construction d’une image
Pour cette commande artistique, l’artiste Geert Goiris a eu carte blanche pour traiter du sujet: Le groupe Rubis et son activité (ses sites industriels).
Les œuvres de Geert Goiris pour Peak Oil associent différentes images, idées et perceptions. La formulation « dans un style cinématographique » souligne l’esthétisation d’un décor et le soin apporté aux plans, cadrages, traitement des couleurs (contrastes) ou du noir et blanc. L’image est « belle », porteuse de références cinématographiques et convoque nos imaginaires.
Cette proposition artistique pourrait sembler poétique. Ces photographies emmènent avec elles une dramaturgie sous tension.
Ces images pourraient réconcilier les univers industriels et littéraires, romantiques et fantastiques.
L’imaginaire du caché trouve ici toute sa puissance – ce que nous ne savons pas, ce que nous ne voyons pas/ par choix ou par nécessité.
Cet accès à l’immontré transforme notre appréhension du réel. De surcroît les scènes photographiques, telles qu’elles sont relatées par Geert Goiris, sont autant d’éléments factuels qui viennent documenter et nourrir dimension irréelle.
Cette documentation faite par un artiste participe à l’anoblissement des activités du Groupe Rubis dont les sites industriels sont désignés « paysage industriel contemporain ».
« Contemporain » est un adjectif qui nous conduit tout droit vers l’art contemporain même si sa définition induit » de la même époque, de la même période ».
Le « Paysage » raconte une vue d’ensemble, une étendue spatiale naturelle ou non, mais l’effet produit dans l’appellation « paysage industriel » est autre. Nous pensons à un tableau, celui-ci serait renforcé par la désignation complète: « paysage industriel contemporain ». Ces usines voient leur image muter, nous glissons des sites industriels vers des territoires artistiques.
Ce paysage, cet environnement, cette présence…Un vocabulaire valorisant pour créer un passage des sites industriels vers le patrimoine industriel.
Avec Peak Oil, il n’est en rien restitué à l’aune de sa dangerosité, de son impact, de son rôle sur les écosystèmes…Il est romancé et sa subjectivité interpelle car elle vient narrer une histoire hors du temps où la présence humaine est très rare.
L’art se met au service d’une image. Quelle superbe démonstration d’un processus de valorisation que cette commande!
La notion temporelle fait, assurément, une entrée fracassante car pour certains clichés nous sommes incapables de situer la période, l’époque.
De plus, l’abstraction endort ce paysage, ce qui engendre un caractère lointain quasi inoffensif à ce dernier.
La question du rôle est posée. Le nôtre? Dans cette scène d’abandon, quelle est la part de responsabilité de l’homme? Qu’avons-nous engendré, produit comme décor?
Quel degrés d’altération s’est exercé sur les biotopes/écosystèmes documentés par cette image?
Ce sont aussi les formats et l’utilisation de support type Wallpaper en version XXL qui renforcent cette impression. Les gros plans/ plans serrés accentuent l’impression d’un paysage si vaste qu’il est impossible à restituer. Comment lui apporter de la concrétude ?
Pas de panorama, au sens photographique du terme, pour traduire ces sites industriels mais une surface géographique immense qui tient aux détails.
L’œil est captif de ces espaces circonscrits toutefois invisibles jusqu’alors.
Exposition Peak Oil de Geert Goiris au FRAC Source
Le terme « Monde » renvoie à plusieurs définitions: Un tout, un ensemble de choses, ensemble de tout ce qui existe, à l’environnement des êtres humains, à un milieu ou un groupe social défini par des caractéristiques… Il est aussi une expression qui peut accroître, intensifier la portée de ces images en accordant une importance majeure à ce qu’elles désignent. Elles forment un monde, à elles seules.
Ce qui vient créer le trouble c’est aussi la capacité narrative de Peak Oil à nous montrer les séquences, les détails comme partie prenante de ce « tout ».
Geert Goiris est reconnu pour la tailles de ses formats comme nous l’avons vu qui agissent comme une démonstration de force. Par ailleurs, son nom est associé à des expositions prestigieuses au regard de leur scénographie et des lieux qui les ont accueillies. Sa reconnaissance internationale accroit le phénomène d’attraction, en effet, pour un groupe comme Rubis, c’est l’assurance de quelque chose d’unique, de grandiose au rayonnement implicite.
« Se faire tirer le portrait » par un artiste comme celui-ci c’est aussi susciter un intérêt, une adhésion et renforcer un sentiment d’attachement voire de fierté. Souvenons-nous. Nous avions évoqué la notion de fierté ouvrière, précisément au Grand-Quevilly.
Lorsque je fis l’expérience de cette visite (du 09 décembre 2017 au 14 janvier 2018) au FRAC Normandie Rouen, je fus très surprise de la diversité des publics et du nombre de personnes ayant fait le déplacement. Il est vrai que la période de monstration était très courte (à peine un mois).
Les retours que j’obtins, lors de la rédaction de mon mémoire universitaire (la programmation artistiques à l’aune des nouveaux espaces de référence, Rouen, ville – Métropole), auprès de Julie Debeer (chargée des publics de la structure) pour cette exposition furent plutôt surprenant. Elle ne s’étonnait pas du succès. Selon elle, les gens venaient voir ce qu’ils connaissaient. Ce qui me sembla être une (ré)activation de ressources spécifiques pour un territoire ne paraissait pas être perçu ici.
Ce territoire social possède une très longue et riche histoire ouvrière dont peu de structures s’emparent et dont on préfère taire voire minorer l’existence. Ce qui contraint une commune à avoir un récit autorisé, parfois hors-sol (non inscrit)La présence des ces usines sont inscrites dans l’esprit, les souvenirs, la parole et les parcours de ces habitants, de ce fait, ne pas y faire référence, efface la spécificité de cette ressource.
Par cette commande, le groupe Rubis s’est offert la (ré)activation des ressources spécifiques (les habitants, ouvriers ou non, attachés, curieux de leur environnement industriel) de ce territoire social.
Une manière stratégique de produire et de réactiver de l’attachement. Ce groupe industriel n’a pas à être inquiéter à ce propos au vu du succès remporté par cette exposition, de plus, elle est parvenue à faire se déplacer des personnes qui n’étaient jamais allées au FRAC.
Que dire, hormis s’interroger encore et encore sur l’attachement paradoxal des habitants de ce territoire, questionner les notions d’éthique et de responsabilité, présupposées par les « malgré » et « au contraire » de nos trois articles étudiés.
Cet article a été conçu en deux temps. Vous découvrez, ci-dessous, la 1ère partie.
Nous avons introduit le Territoire social & culture au travers l’approche du Petit-Quevilly et de l’histoire de ses salles de spectacles. Cette commune, à l’aune de sa politique et donc de sa politique culturelle, propose une histoire culturelle constitutive de sa mémoire collective.
La raison d’être de ces salles – leurs devenirs, leurs disparitions- s’étend sur plus d’un siècle. Elle concerne les souvenirs de plusieurs générations d’habitants. Ces salles ont connu un essor en écho au dynamisme économique. Souvenons-nous que cette commune est fortement marquée par son industrie chimique depuis plus de deux siècles (1808 sonnait l’arrivée de Maletra).
Cette relation entre structure culturelle et territoire extra local soulève, aujourd’hui, beaucoup de questions notamment au regard de l’inscription de ces dernières sur ce même territoire et au vu de leurs publics. Nous y reviendrons par la suite.
Pour cet article, nous nous interrogerons sur le rapport qu’entretiennent les industries chimiques/pétrochimiques avec la culture.
Nous nous servirons uniquement des éléments textuels, iconographiques mis à disposition sur le site du Rubis mécénat cultural found pour commencer.Source
Capture d’écran site internet du mécène
Le mécénat d’entreprise avec Rubis Mécénat cultural found
Qui est ce mécène?
logo
Rubis Mécénat cultural fund, fonds de dotation créé par le groupe Rubis en 2011, a pour mission de promouvoir le développement artistique en France et à l’international dans les pays où le Groupe est implanté.
Culture et art
Une distinction est faite entre « art » et « culture » au sens où l’entend le cinéaste, Jean-Luc Godard, « La culture c’est la règle, alors que l’art c’est l’exception. La culture c’est la diffusion, et l’art la production. »Entretien J.L Godard
Mais aussi comme l’aborde le psychologue et docteur en anthropologie, Claude Wacjman, « l’art divise et la culture rassemble.
Il est dans l’intérêt, pour ce mécénat de parler de « cultural found » plutôt que « d’artistic found » pour les raisons rassembleuses invoquées, néanmoins, le sujet de notre article est une commande passée à un artiste. Certes, sa diffusion passe par une exposition mais c’est une requête à destination d’un artiste qui reste effectuée.
Que fait ce mécène?
Ses interventions se déclinent en cinq actions qui vont des projets sociaux culturels aux commandes artistiques en passant par les projets DIY, Les éditions, la série art (ist).
PROJETS SOCIAUX- CULTURELS : Depuis 2012, Rubis Mécénat développe des initiatives sociales et artistiques pérennes dans certains pays d’implantation du groupe Rubis,
afin de transmettre à une jeunesse fragilisée des compétences artistiques et des compétences de vie à travers la pratique des arts visuels. ( Trois projets concernent Madagascar, Afrique du sud et la Jamaïque, ils sont spécifiés ici Source
PROJETS DIY : Projets artistiques menés avec les collaborateurs au sein des filiales du groupe Rubis. (Christophe Bogula* Rubis Terminal 2013-2018 Source Le M.U.R Vitogaz France 2018 Source
*Christophe Bogula travaille comme mécanicien chez Rubis Strasbourg depuis 2006. Séduit par l’esthétique de l’architecture industrielle ancienne, Christophe photographie son environnement de travail et ses collègues depuis 1992. Son travail s’inspire de celui d’August Sander. [Photographe allemand (1876- 1964) qui réunit photographie documentaire & démarche artistique]
LES ÉDITIONS
Sont présentées, ci-dessous, des captures d’écran de ces éditions afin d’avoir une idée de la présentation et d’en apprécier la démarche qualitative de cette action.
LA SÉRIE ART (IST)
Alexander Murphy – Capter le profil des artistes soutenus par Rubis Mécénat, aux univers et aux cultures différentes, voici le pari de la série ART(ist).
« En 5 minutes environ, l’on découvre le travail et l’univers de chaque artiste en leur donnant la parole sur la création artistique et son rôle dans la société actuelle.
À travers ce projet, Rubis Mécénat souhaite mettre en avant la diversité des artistes soutenus par le fonds culturel. »
Une capture d’écran de l’onglet de la SÉRIE ART(ist)
Nous pouvons remarquer que l’artiste dont nous allons parlé dans cet article fut le 1er de la série.
COMMANDES ARTISTIQUES
Depuis sa création, Rubis Mécénat fait dialoguer art contemporain et lieux spécifiques en s’associant à des artistes émergents et en milieu de carrière.
Le fonds commande aux artistes des œuvres d’art, destinées à habiter des lieux atypiques et à être exposées et/ou dialoguer avec les sites industriels du groupe Rubis. Ces œuvres sensibles placent l’histoire du lieu en leur centre et s’en inspirent.
Pour chaque commande, Rubis Mécénat aide à la production des œuvres et accompagne l’artiste tout au long de sa recherche et du processus de création. Cet accompagnement passe aussi par un soutien de plus long terme, via l’achat d’œuvres et la réalisation de publications. Autre manière de valoriser le travail de l’artiste et de ceux qui l’entourent, une vidéo est réalisée sur les différentes étapes de la réalisation de l’œuvre.
Que ce soit lors de collaborations avec des lieux comme le Collège des Bernardins ou l’église Saint-Eustache, à Paris, ou sur les propres sites du Groupe, Rubis Mécénat laisse toujours carte blanche aux artistes invités.
Ces commandes impliquent les étudiants des Beaux-Arts de Paris (2013/2018), Benjamin Loyauté et son Expérience de l’ordinaire en 2018, Fanny Allié avec Silhouettes en 2012, Kalos-Sthénos (2018) et Les Voyageurs depuis 2015.
Geert Goiris avec Peak Oil (2017/2018), Kid Creol & Boogie l’Orée depuis 2017, Stéphane Thidet avec Le solitaire ne 2017, Leonara Hamill avec Furtherance ( 2014/15) et enfin Cyprien Clément-Delmas avec A la croisée des regards en 2011 et On Site depuis 2012.
L’artiste Geert Goiris nous intéresse car son projet Peak Oil est le fruit d’une commande de Rubis Mécénat cultural found et d’un partenariat avec le FRAC Normandie Rouen. De plus, j’ai pu faire l’expérience de visite de cette exposition et m’entretenir avec Julie Debeer, la chargée des publics du Frac.
PEAK OIL de Geert Goiris
Geert Goiris
Geert Goiris est un photographe belge qui vit et travaille à Anvers, en Belgique.
Après des études à la LUCA School of Arts de Bruxelles (Belgique), à la FAMU Film and Television Academy de Prague (République Tchèque) ainsi qu’au Higher Institute for Fine Arts (HISK) à Anvers (Belgique), Geert Goiris se fait connaître à l’international dès 2004 notamment grâce à sa participation à la Biennale d’art contemporain Manifesta 5 de Saint-Sébastien (Espagne).
L’artiste est représenté par la galerie parisienne Art:Concept (France).
Le travail de Geert est régulièrement exposé dans les grandes institutions européennes telles que le Boijmans Van Beuningen Museum (Rotterdam, 2007), le Wiels Contemporary Art Center (2010), le Palais de Tokyo, (Paris, 2010), le Hamburger Kunsthalle de Hambourg (2011), le Nouveau Musée National de Monaco (NMNM) (2012), le Chicago Museum of Contemporary Photography (Etats-Unis, 2015), ou encore le Centre Pompidou- Metz (2016).
En 2016, le Frac Normandie Rouen lui a consacré une exposition monographique intitulée « Fight or Flight ».
Peak Oil
L’artiste belge Geert Goiris s’est rendu tout au long de l’année 2017 sur 12 sites industriels de Rubis Terminal (filiale du groupe Rubis), couvrant l’ensemble des dépôts en Europe, afin de développer une série photographique, intitulée Peak Oil, sur le thème du paysage industriel contemporain.
Il a sillonné les zones portuaires et industrielles de Dunkerque, Rouen, Brest, Strasbourg, Village-Neuf, Saint-Priest, Villette-de-Vienne, Salaise-sur-Sanne, Bastia, Ajaccio, Rotterdam et Anvers.
En adoptant un style cinématographique et suggestif, Geert Goiris propose
« une narration ouverte qui oscille entre familiarité et aliénation, découverte et fabulation ».
Cette commande photographique, faite à un artiste de renommée internationale, est le fruit d’une collaboration inédite entre Rubis Mécénat et le Fonds régional d’art contemporain (Frac) Normandie Rouen.
Initiée par le Frac et Rubis Mécénat, elle donne lieu aujourd’hui à quatre projets :
Une exposition au Frac,
Deux installations d’envergure dans le Port de Rouen
Une parution chez Roma Publications.
Avant de nous attacher à la narration de l’exposition et à ses publics, nous allons questionner la portée, la résonance de cette commande. Quelle traductrice d’image de ces sites industriels est-elle? Comment est-elle rapportée? Quel peut être son rôle pour le groupe Rubis Terminal?
Une question d’IMAGES
Geert Goiris, Peak Oil, 2017
Nous allons lire des critiques de cette expositions en retenant trois propositions publiées par Paris Art,Réponse Photo, L’œil de la photographie. L’idée est de percevoir l’image de ce mécène telle qu’elle est racontée par ces auteurs/ journalistes. Ils correspondent à des prescripteurs et participent à la construction de cette image souhaitée/Voulue par le groupe Rubis Terminal. Le mécénat c’est aussi un miroir, déformant diront certains, il n’en demeure pas moins qu’il véhicule, par sa stratégie marketing, une certaine idée de l’apparence. Il construit une forme d’ histoire parallèle à l’activité des industries du groupe Rubis Terminal.
Quatre séquences narratives retiennent mon attention:
Selon cet article, la série de photographies Peak Oil de Geert Goiris documente le paysage industriel contemporain.
Les images de Geert Goiris permettent de documenter et de porter à la vue de tous des sites rarement accessibles au public et même le plus souvent cachés des regards, des infrastructures complexes qui jouent pourtant un rôle crucial dans notre société dépendante en carburants et combustibles.
Ces clichés adoptent un style cinématographique et narratif qui vise à se détacher des modes traditionnels de représentation de l’industrie. Le photographe cherche à mettre en lumière la place qu’occupe le corps dans un environnement industriel et la façon dont un tel paysage, où règnent l’acier le béton et la lumière artificielle, influence les gestes de ceux qui y vivent.
Geert Goiris montre un monde où les navires, camions, moteurs, conteneurs, pipelines et wagons semblent dotés d’une présence fantastique.
Elle reprend en détails les éléments dont nous disposons, puis ajoute:
« Parmi les photographies exposées, dix seront offertes au Frac par Rubis Mécénat afin d’enrichir sa collection et plus particulièrement son fonds photographique dédié au territoire. »
Et termine par: « En 2018, la commande photographique Peak Oil est a nouveau mise à l’honneur à l’occasion de deux évènements d’importance : l’installation d’une image pérenne et monumentale, sous forme d’un wallpaper XXL, sur l’un des réservoirs de Rubis Terminal dans le Grand Port Maritime de Rouen et une nouvelle présentation de la série dans le cadre du festival PhotoSaintGermain, du 07 au 24 novembre 2018.
Ce qui m’attire ce sont les expressions, le vocabulaire et le portrait qui est dressé de l’artiste:
Dans son article du 4 octobre 2018, Carine Dolec, reprend comme éléments de contextes la renommée internationale de Geert Goiris. Situe l’artiste comme « habitué des publications prestigieuses et des expositions poids lourds ».
« Geert Goiris a réalisé pour le groupe Rubis une commande taillée sur mesure: très gros plans, matières, cadrages secs et bien coupés et paysages romantiques, il montre ces « moments particuliers où le pétrole semble inoffensif.
Le sujet n’est pas les prouesses techniques de l’extraction du pétrole, ni les effets économiques, sociaux et/ou géopolitiques liés à son existence. Au contraire, le sujet est dans les temps de latence, ces moments où le pouvoir du pétrole est uniquement sous-jacent. »
COMPARAISONS
Les trois articles ont leur propre style, allant d’une critique romancée voire littéraire pour la 1ère, à un papier purement communicationnel qui reprend l’actualité de cette commande pour la seconde. La 3ème, quant à elle, s’interroge sur le notion de sujet et la manière opportune, dans ce cas, de le traiter.
Nous retiendrons les expressions, groupe de mots suivants:
Ensuite, nous pouvons extraire ceux-ci : Documenter, portée à la vue, sites méconnus, cachés des regards ainsi que la préposition « malgré » et la locution adverbiale « au contraire » dans les phrases « sites méconnus malgré leur rôle majeur » (article 1) et « Au contraire le sujet est dans les temps de latence… (dernière phrase de l’article 3)
Nous prélèverons également, les annotations suivantes:
XXL, monumentale, expositions poids lourds.
Nous poursuivrons ces observations dans un temps 2, très prochainement.
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